top of page
Planche
LE SOLEIL ET LA LUNE (Navigation de décembre 2017)

Navigation du 1er décembre 6018

Le Soleil et la Lune

Deux astres, deux luminaires, deux symboles.

Mais je ne vais pas ce soir me diriger vers des explications académiques.

Non, ce titre m’a tout simplement ramené de nombreuses années en arrière

quand, jeune élève pilote, j’ai eu à traiter dans mes cours théoriques et pratiques

de Navigation du Soleil et de la Lune. La Lune fut d’ailleurs l’une de mes

questions de cours lors de mon oral d’examen de pilote de ligne dans le bâtiment

de l’ENAC à Orly.... Et oui nous étions encore en 1968.

Vous voyez immédiatement quelle résonance pour moi d’avoir à parler aujourd’hui

bien différemment de ces deux astres. Bien différemment ? pas tant que ça. ...

 

Vous voici maintenant pilote ou même marin. Et vous êtes en charge de faire le

POINT à bord du navire qui vogue ... Ah, voilà ... ça commence, avec quelque

chose de précis pour un Franc-Maçon, le POINT.

La précision des outils de mesure a évolué avec le temps. Une méthode simple et

lointaine mais très approximative est de lever la main avec le bras tendu. La

largeur d'un doigt correspondant environ à 1,5° d’arc. La nécessité de disposer

d'outils de mesure plus précis a entrainé le développement de nombreux outils de

plus en plus performant, le bâton de Jacob (ou arbalestrille), le kamal des

navigateurs arabes, le quadrant, l'astrolabe, l'octant et enfin le sextant, qui permet

par un jeu de miroirs de mesurer la hauteur de l'astre au-dessus de l'horizon avec

une bonne précision.

Gardons pour faire ce point profane, l’outil idéal, le sextant. Et que peut-on obtenir

avec un sextant ... une DROITE DE HAUTEUR

.... Nous n’avons besoin pour y

parvenir que de deux éléments en plus de notre sextant, des tables éphémérides

et une montre très précise qui nous donnera le TEMPS, le temps qui défile, le

temps linéaire, mais le temps absolument précis. Nous voilà déjà dans la

précision et la rigueur. Et qu’allons-nous définir avec cette droite de hauteur ? un

pied d’ASTRE. Il peut être solaire, lunaire ou donné par un autre des astres de la

VOUTE CÉLESTE. Ce pied d’astre va, une fois porté sur la surface terrestre, déterminer un centre puis un CERCLE, tiens, tiens ... Ce cercle représentera l’ensemble des points de la surface terrestre depuis lesquels on pourra voir sous un même angle le luminaire choisi. Il nous suffira ensuite de répéter cette observation plusieurs fois en des temps différents de la journée, en particulier, le

matin, le midi et le soir pour dessiner des cercles sécants sur la surface du globe,

cercles dont les différentes intersections, au cours de la navigation, nous

permettront de définir nos positions successives avec une précision toute

relative.

Ces axes entre astres et pieds d’astres, ne sont ils pas orientés du Nadir au

Zénith ? et quel fil à plomb n’est-il pas tendu entre l’astre et son pied ?

Allons encore un peu plus loin dans la pratique du point. C’est justement le Soleil

qui est le plus utilisé. Prenons notre sextant en main et tout naturellement nous

allons le tenir par l’alidade puis faire notre visée dans un PETIT MIROIR, pour

poser d’une manière tangentielle à l’aide du GRAND MIROIR, le bas (ou le haut)

du Soleil sur l’horizon. Quand je vous disais, que nous sommes dans une pratique

symbolique ... En déplaçant l’alidade sur l’arc de cercle du Sextant que l’on

nomme le Limbe, au pied de ce sextant, en «posant» grâce au mouvement de

l’alidade dans notre visée avec le miroir, le bord inférieur du Soleil sur l’horizon,

nous mesurons avec une immense précision les degrés de cet angle dont nous

allons nous servir pour ensuite, ouvrir notre COMPAS et TRACER

sur la carte notre CERCLE.

Mais encore un indice plutôt symbolique, pour bien réaliser lamesure, il vous faudra vous tenir

parfaitement droit, le sextant bien calé dans les mains, comme à l’ORDRE, malgré tangage et roulis.

Du lever du Soleil au crépuscule et du crépuscule au lever du Soleil, les visées

seront nombreuses mais la référence principale sera la

visée méridienne, celle du Soleil à MIDI. De Midi à Minuit

et de Minuit à Midi....

Je crois que vous avez compris que sans notre Soleil ou à défaut sans notre

Lune, nos navigateurs n’auraient jamais atteint les côtes inconnues qu’ils

recherchaient et nos pilotes de l’Aéropostale auraient eu beaucoup de mal à

traverser l’Atlantique Sud.

J’ai eu le bonheur de pratiquer ces visées en avion et j’avoue très humblement

que c’était vraiment une affaire de spécialistes et pas du tout une affaire d’élève.

Mais ce qui permettait aux navigateurs de connaître leur «latitude» c’est à dire

sur quel parallèle ils se trouvaient, ne leur permettait pas de trouver leur position

exacte en une seule visée. Il manquait ... la longitude, c’est à dire l’arc vertical

reliant le pôle nord au pôle sud croisant la latitude nécessaire.

La Longitude, clé de la position exacte réclame une précision quasi absolue quant

à l’heure. Et de plus il faut imaginer une longitude «

Zéro», une longitude «référence». Celle-ci fut successivement placée à Cadix, Paris, Naples ou même Cracovie et pour finir à Greenwich en 1884. On savait déjà que la circonférence

de la Terre est de 40 000 km à l’Équateur. Pour 360 ° on trouve par degré de

séparation entre deux degrés de longitude 40000 / 360 = 111 km environ.

Connaissant l’heure locale de départ par rapport au méridien de référence, on

pouvait estimer grâce à une montre précise, l’écart en nombre de degrés, et

dixième de degrés de longitude, donc une distance.

L‘heure recherchée était celle connue à cette position zéro, et en partant ensuite

de la longueur de l’Équateur, on obtenait une distance sur ce grand arc, sur ce

méridien.

Les marins du 16ème siècle ne connaissaient pas encore le temps sacré mais ils

avaient besoin du «Temps » profane le plus précis possible. Ce fut l’origine des

montres les plus précises que l’on connaît aujourd’hui.

La lecture d'un sextant bien réglé permet une précision de 0,2' d'arc. En théorie,

un observateur peut donc déterminer sa position avec une précision de 0,2

miles marins, soit environ 360 m. Dans la pratique, les navigateurs obtiennent une

précision de l'ordre de 1 ou 2 milles marins (mouvements du navire, houle,

horizon plus ou moins net, imprécisions de l'heure).

Mais revenons à notre Loge, à nos symboles proprement dits.

Le chemin que parcoure un navigateur dans notre monde sacré est un long

chemin de Vérité, long, très long, peu sûr, et parfois même chargé de mystère.

Comme ce pilote tombé dans le désert et animé par le doute.

Comment vais-je m’en sortir? Ce désert est symboliquement un désert moral où

l’isolement est propice à la prise de conscience, à la réflexion, à la mise à nu. Les

acquis deviennent inutiles et les certitudes n’existent plus. Ce désert peut devenir

au choix une tombe ou un lieu de lutte. La lutte pour la survie dans ce milieu

hostile demande un vrai combat avec soi-même, un dépassement de soi, une

synergie entre le soi et les éléments hostiles. Lutte contre notre propre ego. Le

petit Prince surgit et dit «ce qui embellit le désert, c’est qu’il cache un puits

quelque part». Et il rajoute, «j’ai soif de cette eau là». Et là, l’auteur, St Ex,

comprend ce qu’il veut dire. C’est dans le puits qui est en chacun de nous que se

trouve l’eau qui dissimule ou symbolise notre propre Vérité. Il ne nous reste qu’à

trouver notre propre puits et à y puiser l’eau que nous voulons boire.

Saint Ex lui-même écrit :

J’ai toujours aimé le désert, On s’assoit sur une dune de sable. On ne voit rien, on

n’entend rien et cependant quelque chose rayonne en silence. Ce qu’il y a de beau dans le

désert, c’est qu’il cache un puits quelque part.

C’est en voulant chercher ce puits que le Petit Prince quittera son astéroïde B 612

pour visiter les autres astéroïdes. En particulier, quand il découvre l’astéroïde du

Géographe, savant qui connaît tous les fleuves, les terres, les déserts,mais dont

le travail sans un explorateur ou un navigateur à sa disposition pour les visiter

devient inutile

Et c’est peut-être ce chemin symbolique que les premiers navigateurs ont cherché

à suivre. Mais le but de ces voyages n’est pas forcément de chercher un ailleurs

lointain. Le but de ces voyages est de se découvrir Soi-même dans sa propre

Vérité, de poser un regard sur les Autres, de convertir son regard de profane en

regard d’initié. Avant de conclure et pour susciter une réflexion, je voudrais vous lire une phrase

tirée de l’Apocalypse de Jean :

«Un matin se lèvera le Soleil justicier et ce sera la résurrection des morts et

le Jugement Dernier

La Jérusalem céleste descendra du Ciel, rayonnante

Il n’y aura plus de Jour, il n’y aura plus de Nuit

Le Soleil et la Lune seront devenus inutiles, deux anges les enlèveront.»

Encore une fois, la Loi céleste s’applique, un nouveau cycle est prêt à

recommencer.

Apprenti nous le resterons à jamais et c’est bien là une des leçons de notre

initiation, placé sur le pavé mosaïque en recherche permanente, comme tous les

navigateurs, entre le Soleil et la Lune.

J’ai dit, Père Noé.

bottom of page